Depuis la crise des années
trente, l’activité bancaire était traditionnellement très réglementée. Au nom
de la stabilisation du système bancaire, un ensemble de dispositifs
réglementaires (agréments des autorités publiques, restrictions à l’entrée de
nouvelles banques sur le marché, séparation stricte entre banques et
non-banques, etc.) réduisait la concurrence interbancaire. Cette protection
légale permettait au club de banques en place de dégager des taux de profit
largement supérieurs à ceux d’autres industries moins réglementées. Cette
spécificité a été remise en cause depuis les années quatre-vingt, l’industrie
bancaire ayant subi une modification drastique des conditions de la concurrence
sous l’effet conjugué d’un choc de demande, dub choc technologique et d'un
changement radical «environnement réglementaire. En effet, l’accroissement de
la variabilité des taux de change et des taux d’intérêt a suscité une forte
demande pour des instruments de gestion du risque tels les contrats à terme ou
les options. Il en a résulté un fort développement de ces marchés de produits
dérivés. L’essor considérable de la gestion collective de l’épargne, la montée
en puissance corrélative des investisseurs institutionnels ainsi que la
diversification internationale des portefeuilles sont également des éléments
essentiels de la forte transformation de la demande. Ces évolutions ont affecté
tous les pays industrialisés et vont toutes dans le sens d’un accroissement de
la part des marchés dans le financement des économies. Le choc technologique
concerne quant à lui l’incorporation rapide des progrès technologiques en
matière de transmission et de traitement de l’information (informatique et
télécommunications). Ces évolutions techniques ont permis à l’industrie
bancaire de réduire les coûts de transaction associés aux opérations
financières et ont stimulé la diversification de l’offre de produits. Enfin, la
déréglementation a considérablement réduit les barrières légales à l’entrée
dans le secteur bancaire, et ainsi altéré les situations de rente dont
bénéficiaient les banques en place.
Ces trois chocs (demande, technologique
et réglementaire) ont suscité de profondes restructurations de l’industrie
bancaire, une altération des performances et une modification des comportements
des banques. Ces évolutions sont analysées par les économistes à l’aide des
concepts et outils de l’économie industrielle et de la théorie de la
concurrence imparfaite [Cahuc, 1998; Gabszewicz, 20031.
Les marchés bancaires
sont-ils devenus contestables? L’industrie bancaire est-elle en surcapacité?
Quelle est la logique du mouvement de concentration-diversification que l’on
observe dans le secteur bancaire? La présence d’économies d’échelle et
d’envergure suffit-elle à expliquer l’ampleur de ce mouvement? Telles sont les
questions majeures traitées par l’économie industrielle appliquée à la banque.